Selon Wikipédia : “Une thérapie brève est une approche souvent psychologique d’un client ou d’un patient afin d’obtenir des résultats sur une très courte période, quelquefois en une ou deux séances (par exemple dans certains cas d’hypnothérapie). L’École de Palo Alto recommande une dizaine de séances pour une problématique donnée.”
Une dizaine de séances étant le moment ou le thérapeute peut décider de mettre un terme à la psychothérapie dans le cas exceptionnel où aucun changement n’a été observé.
Il existe plusieurs types de thérapies brèves, la plupart inspirées principalement des travaux du psychiatre et psychothérapeute Milton Erickson :
- L’hypnose Ericksonienne
- La thérapie centrée sur la solution
- La programmation Neuro-Linguistique (PNL)
- La thérapie brève systémique et stratégique (Ecole de Palo-Alto)
De plus en plus de professionnels de la relation d’aide sont formés à la thérapie brève qu’ils soient psychiatres, psychologues, psychothérapeutes, psychopraticiens ou même éducateurs. Mais leur nombre restent réduit car ce type d’approche n’est pas enseignée en université et nécessite quelques années de formations complémentaires.
Bien que formé aux approches suscitées je vais mettre l’accent sur le modèle de l’école de Palo Alto.
Quelle est l’histoire de la thérapie systémique?
L’initiateur du travail qui mena dans les années 50 à la création du groupe de recherche appelé plus tard école de Palo Alto s’appelle Grégory Bateson. Anthropologue et Zoologue, il donna sa contribution à l’approche systémique. Plutôt que de se demander pourquoi telle personne peut se comporter de manière anormale il s’est plutôt demandé dans quel contexte humain son comportement est logique. Le postulat de départ de l’équipe formée par Bateson, Weakland, Don Jackson est qu’il est impossible de ne pas communiquer”.
Quels sont les postulats de la communication?
La communication interpersonnelle était devenue le centre de leurs études. Voici quelques-uns de leur postulat : la communication peut être simultanément digitale et analogique.
Le langage digital repose sur les mots qui désignent des choses et une syntaxe. Le langage analogique est plus primitif , il repose sur des comportements exprimant des sentiments.
L’autre principe est la métacommunication : échanger sur la communication. Exemple : “Si je te dis ça, c’est parce je t’apprécie”.
Troisième principe : La double contrainte : Proposer deux informations contradictoires : proposer un choix qui n’en est pas un.
Exemple : “Il est interdit de lire ce qui est écrit”.
La double-contrainte est un paradoxe et une source de blocage. Ils avaient découvert qu’une communication malsaine ou pathologique était souvent paradoxale. Dans la double-contrainte quoi que je fasse j’ai tort.
Par exemple : Une mère offre deux cravates à son fils. Pour lui faire plaisir il en porte une. Sa mère lui dit : “Ah! Je savais bien que tu n’aimais pas l’autre.”
Donc quoique le fils fasse, il aura tort.
Ce genre de communication peut s’observer dans beaucoup de relations. Le groupe de Palo Alto aurait repéré plus particulièrement ce genre de communication dans les familles dont un membre est schizophrène.
Qu’est-ce que la communication Paradoxale?
Une communication paradoxale peut être très destabilisante. Si au travail un chef vous dit “Sois autonome, prends des initiatives”. Lorsque vous en aurez pris une, il pourra vous dire : “Je t’interdis de faire quoi que ce soit sans m’en parler”.
Ce genre de communication est insidieuse et il faut vraiment noter les séquences de communication pour se rendre compte du piège.
Dans le domaine des paradoxes il y aussi les injonctions paradoxales.
En voici un exemple : “Sois spontané”.
Si j’obéis à cette injonction je ne peux plus être spontané, car obéir à un ordre est tout sauf de la spontanéité.
Dans le même registre en voici une autre “Je devrais avoir envie”
L’envie est quelque chose de spontané qui ne se contrôle pas. En me donnant l’ordre d’avoir envie je bloque la spontanéité. Plus je me dis que je devrai avoir envie, moins j’ai envie.
C’est par exemple une de ces injonction paradoxale qu’un dépressif peut se faire. Il devrait avoir envie pour faire, mais l’envie est bloquée alors il ne fait pas. Cela est tout aussi vrai avec l’injonction “tu devrais être heureux”.
Les quelques exemples ci-dessus expliquent comment de simples mots, des injonctions participent à créer ou à maintenir un problème psychologique.
En plus des théories de la communication la thérapie brève interactionnelle et stratégique s’est aussi enrichie de la vision systémique.
Qu-est-ce qu’un système ?
Un système est plus que la somme de ses composants. Prenons l’exemple d’un système simple tel qu’un thermostat et une chaudière. Le thermostat est réglé à une certaine température. Si la température baisse il actionne la chaudière et l’arrête dès que la température est atteinte. C’est un système auto-régulé.
Le corps humain est un système auto-régulé. Par exemple le corps maintien la température à 37 en moyenne en se régulant automatiquement. Mais il peut aussi se dérégler ou ajuster la température pour combattre une maladie.
Le système de chauffage central composé d’une chaudière, des radiateurs et d’un thermostat est composé de boucles de rétroaction ou boucles de feedback. Le feedback dans ce cas est assez simple. La chaudière chauffe l’eau qui va circuler vers les radiateurs qui fait monter les températures des pièces. Le thermostat détecte que la température maximale est atteinte et coupe le signal électrique donnant instruction à la chaudière de s’arrêter. Le feedback est une information qui circule entre les éléments du système.
Cette vision systémique s’applique à des systèmes naturels, tels les écosystèmes, sachant que les plantes interagissent entre elles et leur environnement. Cette étude des écosystèmes à donner naissance à un type d’agriculture dite systémique utilisé en permaculture ou l’homme intervient très peu dans le système à l’exemple de la forêt qui pousse sans intervention humaine et qui est l’écosystème le le plus efficace en termes de production de biomasse, comparé aux cultures intensives.
Pour en revenir à la psychologie la vision systémique permet d’analyser les systèmes humains et cognitifs de la même manière, c’est sous la forme de boucle de rétroaction. On étudie donc les interactions.
Prenons le cas d’une personne déprimée voire dépressive. Cet exemple ne prendra en compte qu’un seul élément du problème :
La personne rumine et broie du noir et ne peut s’empêcher de se plaindre à son entourage. La plainte est un feedback.
L’entourage, qui est un élément du système, pourra minimiser la plainte en disant que la personne a tout pour être heureuse, ou que ce n’est pas si grave, que ça va s’arranger, qu’il faut positiver. Un feedback adressé au dépressif.
Comment ce feedback va être reçu : cela renverra à la personne déprimée son incapacité à être optimiste. Car elle aimerait bien l’être mais n’y arrive pas. Ce qui aggravera les pensées noires et les plaintes. La boucle ou le cercle vicieux peut aller en s’amplifiant et le problème en s’aggravant.
L’école de Palo Alto s’est donc concentrée sur le fait d’arrêter ces feedbacks qui aggravent. On pourra demander à l’entourage de ne pas positiver mais de rejoindre la personne sur sa douleur. En disant que ce n’est pas agréable d’être triste mais que c’est normal vu la situation.
La personne pourra ainsi moins culpabiliser.
Les bonnes intentions peuvent avoir des effets pires que de laisser certaines se faire d’elle même. Il y a l’exemple de l’insomniaque qui veut se forcer à dormir.
Voici une vidéo sur le sujet :
Il y a l’hypocondriaque qui veut se rassurer de ne pas avoir une maladie, mais qui se rend malade à force de ne pas y arriver.
Le phobique qui évite l’objet de sa peur, mais sa peur augmente chaque fois qu’il évite.
Le couple qui essaie de ne pas avoir de dispute, alors chacun retient ses griefs de peur de déclencher une dispute, ce qui finit inexorablement par exploser et ils se disputent sur le fait qu’ils ne devraient pas être en désaccord.
La psychothérapie brève interactionnelle et stratégique proposera donc des tâches, appelées aussi des expériences dites “émotionnelle correctrices” qui vont permettre de changer les feedbacks et enrayer les cercles vicieux.
Il se trouve que le Docteur Milton Erikson père de l’hypnose du même nom, ne faisait de l’hypnose que le quart du temps et prescrivait des tâches, souvent paradoxales à ses patients. C’est cette partie du travail du DR Erickson qui a inspiré l’équipe de Palo Alto. Erickson était l’ami de Bateson et consultant pour les chercheurs de Palo Alto pendant des années.
Allier l’hypnose à l’approche de Palo Alto coulait donc de source.
Les fondateurs de la Programmation Neurolinguistique (la PNL) alors basés à Stanford avaient modélisé les travaux en hypnose d’Erickson, mais s’étaient aussi inspiré des recherches de Bateson et de Virginia Satir un autre membre de l’école de Palo Alto. Ils faisaient aussi souvent référence dans leur prédicat à Paul Watzlawick, l’homme qui a popularisé par ses écrits les recherches de Palo Alto.
Un de ces prédicats est : “Il n’y a pas d’échec. Il n’y a que du feedback”.
Le modèle de Palo Alto n’a cessé d’évoluer depuis les années 60 parallèlement aux thérapies cognitives et comportementales (TCC) plus connues. L’efficacité du modèle est attestée par des recherches cliniques. Ce modèle est pratiqué de nos jours par de nombreux psychiatres, psychologues, psychothérapeutes, psychopraticiens et coach un peu partout dans le monde mais plus particulièrement aux Etas-Unis, en Italie et en Belgique. La France pays plutôt conservateur commence à s’ouvrir à cette approche. On a biensur entendu parlé des thérapies familiales, mais le modèle de Palo Alto en est une évolution.
Les recherches continuent en Italie à Arrezzo grâce au professeur Giorgio Nardone et à Liège sous l’égide de Jean-Jacques Wittezael fondateur de l’institut Gregory Bateson.
Le champ d’application du modèle est vaste. Il va du coaching à la thérapie individuelle en passant par la thérapie de couple, les relations parents-enfants. Il donne de bons résultats pour la plupart des problématiques psychologiques décrites dans le DSM. C’est à dire de façon non exhaustive :
- troubles anxieux: phobies, angoisses, obsessions, TOCS…
- troubles alimentaires: anorexie, boulimie, orthorexie, vomissements…
- troubles de l’humeur: dépressions, épuisement, troubles bipolaires…
- stress post traumatique
- conduites « hors normes » : délires, paranoïa, schizophrénie…
- relations parents-enfants difficiles, problèmes liés à une adoption ou émergeant dans des familles recomposées
- hyperactivité, déconcentration, décrochage scolaire, énurésie
- troubles affectifs et sexuels, violence
- stress, harcèlement, fatigue professionnelle, burn-out
La psychothérapie brève de Palo Alto propose également des moyens de mieux situer son action et de mieux gérer les relations dans différents champs professionnels : milieu scolaire, travail social, institutions, organisations et associations, entreprises…
Ce modèle s’est aussi enrichi des apports des thérapies solutionnistes, de l’hypnose des thérapies narratives et des thérapies comportementales et cognitives.